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Victor Wanyama, the Mighty Kenyan

Jules Monnier Jules Monnier est rédacteur pour Sport/Foot Magazine

S’il n’a pas marqué les esprits en Belgique, Victor Wanyama a fait de l’Écosse puis de la Premier League son terrain de jeu, au point de devenir un pion incontournable du Tottenham de Pochettino qui affronte La Gantoise ce jeudi.

7 novembre 2012. Les 60 000 spectateurs de Celtic Park n’en peuvent plus : sur un corner de Charlie Mulgrew, Victor Wanyama remporte son duel aérien face à Jordi Alba et propulse le ballon dans les filets, devenant ainsi le premier Kenyan à marquer un but dans une rencontre de Champion’s League. Un exploit d’autant plus savoureux que ce soir-là, le Celtic terrasse le Barça (2-1), ce qui arrache quelques larmes de joie au chanteur Rod Stewart, en tribune d’honneur.

Le Kenya compte depuis longtemps sur la famille Wanyama pour alimenter son histoire footballistique. Deux ans plutôt, le frère aîné de Victor, Mc Donald Mariga, est devenu le premier ressortissant kényan à disputer une rencontre de CL puis même à remporter la Coupe aux grandes oreilles grâce à 10 petites minutes disputées sous le maillot de l’Inter.

Dans les gênes

Né à Nairobi, le 25 juin 1991, Victor Wanyama grandit donc dans une famille de sportifs puisqu’outre Mariga, son père, Noah a été international, deux autres frères, Thomas et Sylvester, sont footballeurs au pays et sa soeur Mercy joue au basket aux États-Unis.

Malgré le statut du paternel, la famille ne roule pas sur l’or et si Victor a toujours eu de quoi se nourrir, il n’a gagné ses premiers crampons qu’à l’âge de 10 ans en étant élu meilleur joueur d’un tournoi de jeunes.

Au pays des coureurs de fonds, sa stature (il mesure aujourd’hui 1m84 pour 87 kg) et son talent sautent rapidement aux yeux et à 15 ans, il devient le plus jeune international kényan après avoir joué un match amical face au Nigeria. Quelques mois plus tard, il suit les traces de son frère Mariga, et part pour la Suède où il évolue durant une saison pour les U21 d’Helsingborgs, jusqu’à ce que le frangin soit transféré à Parme. Après un bref retour au Kenya, à la JMJ Academy, Wanyama passe avec succès un test au Germinal Beerschot qui lui offre alors un contrat de quatre ans.

Maladresse

Ses premiers pas en Belgique sont loin d’être une réussite. Après un an d’adaptation, il grappille ses premières minutes de Jupiler Pro League, en 2009 et pour son troisième match, il se fait remarquer pour un tacle assassin sur l’Anderlechtois Matias Suarez, qui lui vaudra une expulsion. Quelques jours plus tard, à l’entraînement, il se fend d’un nouveau tacle maladroit et brise le péroné d’un coéquipier.

« J’ai connu des moments difficiles en Belgique », reconnaîtra-t-il plus tard dans les pages du Het Laatste Nieuws. « J’y ai beaucoup appris. J’ai travaillé en silence et j’étais reconnaissant de pouvoir jouer. » En effet, malgré ses maladresses, ses trop nombreuses bourdes défensives et les doutes sur son âge réel, les qualités physiques et le volume de jeu du Kényan lui permettent d’être titulaire et même d’attirer les regards d’autres clubs au terme de sa deuxième saison chez les Rats. Le Standard, notamment, tente de l’attirer et alors qu’un accord est même scellé avec les dirigeants du Beerschot, les Rouches se font dribbler in extremis par le Celtic Glasgow.

Wanyama au duel avec Iniesta lors de Celtic-Barça en Champions League.
Wanyama au duel avec Iniesta lors de Celtic-Barça en Champions League.© BELGAIMAGE

Numéro 67

« J’ai signé dans le club de mes rêves », annonce Wanyama à son arrivée en Écosse.

Si ce genre de paroles est monnaie courante, le box-to-box semble vraiment sincère et pour cause : « Au Kenya, il y a beaucoup de fans du Celtic et des Rangers », explique-t-il au magazine FourFourTwo. « Pendant très longtemps, ils organisaient des matchs de bienfaisance au Kenya. J’avais l’habitude de voir les gens avec des maillots du Celtic et des Rangers aller au pub pour regarder les matchs. » Connaisseur, le médian choisit même de porter le numéro 67, en référence à l’année où le Celtic a remporté la Champion’s League. Un geste qui ne manque pas de plaire aux supporters qui l’adoptent immédiatement d’autant qu’il s’adapte sans plus tarder à la rugueuse Premier League écossaise où son gabarit fait merveille.

Champion dès sa première saison, il enchaîne avec une campagne exceptionnelle en CL qui, en plus de la victoire face au Barça, verra le Celtic atteindre les huitièmes de finale. Impuissant face à la Juventus, le Mighty Kenyan marque toutefois les esprits au point de s’attirer les louanges d’Andrea Pirlo himself : « Il est capable de devenir l’un des meilleurs milieux d’Europe. Il en a les qualités et les attributs physiques. »

À l’issue de la saison, Wanyama remporte un nouveau titre, la Coupe d’Écosse et un nouveau surnom, Spaghetti, suite à un tweet d’anthologie posté le 12 mai 2012: « I had spaghetti and it was very nice i enjoyed it ».

Wanyama époque Southampton.
Wanyama époque Southampton.© AFP

Spaghetti

Pour autant, Spaghetti ne prend pas le chemin de la Serie A italienne, c’est la prestigieuse Premier League qui lui fait les yeux doux. Alors qu’il l’avait payé un peu plus d’un million d’euros, le Celtic en empoche près de 15 de la part de Southampton, faisant de Wanyama le plus gros transfert sortant d’Écosse. Ardemment désiré par le coach des Saints Mauricio Pochettino, le Kényan signe des débuts de bonne facture mais une blessure vient mettre un terme à sa saison dès février et l’empêche d’imprimer véritablement sa marque à l’équipe.

He’s a Kenyan, a mighty Kenyan, called Victor Wanyama.

Ce n’est que lors des deux saisons suivantes, entre 2014 et 2016 sous les ordres de Ronald Koeman, qu’il va véritablement s’ériger comme l’un des meilleurs milieux défensifs d’Angleterre, permettant même aux Saints d’atteindre la 6e place, leur meilleur classement depuis la création de la Premier League. Malgré ses trois cartes rouges la saison dernière, il est transféré dès le début du mercato estival par Tottenham, coaché par un certain Pochettino qui n’a rien oublié de ses amours kényans. Acheté pour un peu plus de 15 millions d’euros, Wanyama pose une poignée de spaghetti à la main lors de sa présentation chez les Spurs, preuve que l’humour britannique n’a plus de secrets pour lui.

Qu’il soit associé à Eric Dier, à Moussa Dembélé voire utilisé comme seul numéro 6, Wanyama est d’emblée devenu un élément central de Tottenham et n’a loupé jusqu’à présent que 38 minutes de jeu. S’il se montre toujours aussi agressif (seul Paul Pogba et Christian Benteke ont commis plus de fautes que lui en PL, 49), il se classe parmi les meilleurs de Premier League en ce qui concerne les tacles réussis (2,6/match, 23e) mais également les passes effectuées (58,2/match, 21e). De quoi faire frémir les Gantois d’autant que l’homme a une revanche à prendre : lors de son seul duel en Coupe face aux Buffalos, Wanyama s’était incliné 1-0.

Par Jules Monnier

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