© Getty Images/iStockphoto

Acheter un club chinois? L’ex-président du Barça l’a fait

Des patrons chinois ont dépensé des millions pour acquérir l’Inter Milan ou Auxerre. Pour la première fois, le flux s’inverse: une équipe pékinoise de « joueurs empâtés » vient d’être rachetée par l’ex-président du FC Barcelone. Et vise désormais les sommets.

Le club professionnel de football de l’Institut de technologie de Pékin (le « BIT »), une université réputée, est devenu il y a quelques semaines le tout premier du pays à avoir des capitaux étrangers. Ce « Petit Poucet », pensionnaire de 3e division, a vendu, pour un montant tenu secret, 29% de ses parts à CSSB, un groupe espagnol fondé par d’anciens du FC Barcelone. Et non des moindres: l’ex-président Joan Laporta (2003-2010) et l’ex-directeur général Joan Oliver (2008-2010), dirigeants du Barça en 2009, année où le club catalan avait conquis un record de six titres.

« On veut mettre en place ici le même système qu’au FC Barcelone, notamment en matière de formation des jeunes », assure Lola Sanchez, directrice générale Chine de CSSB.

La Chine n’occupe que la 82e place du classement mondial de la Fifa. Mais sous l’impulsion de son président Xi Jinping, grand amateur de foot, elle suit une ambitieuse feuille de route pour le ballon rond. Le nombre d’écoles de football va passer de 13.000 actuellement à 40.000 d’ici 2020. Et l’objectif est de placer le pays « au sommet du football mondial d’ici 2050 ».

« La Chine a un potentiel énorme. Mais les clubs n’y développent pas le football comme ils le devraient. Nous voulions changer les choses. Et une prise de participation était le seul moyen d’avoir un pouvoir de décision », explique Mme Sanchez.

– Porc et sucreries –

Derrière elle, les joueurs de l’équipe pékinoise, 23 ans de moyenne d’âge, dont une majorité d’étudiants, effectuent des passes sur le terrain synthétique du campus écrasé de chaleur.

Le tout sous le regard de leur nouvel entraîneur Roberto Ahufinger del Pino, tout droit arrivé d’Espagne.

« L’un des changements importants, c’est au niveau de la mentalité. On veut en faire des gagnants », explique-t-il, avant de donner ses instructions aux joueurs en castillan, aussitôt traduites en chinois par un interprète.

Aucun drapeau catalan ne flotte (encore) au-dessus des terrains du club. Mais cinq Espagnols sont désormais basés à l’année en Chine, dont trois entraîneurs et un directeur sportif venus du FC Reus (D2 espagnole), autre club possédé par CSSB.

« Au début, c’était difficile. Mais petit à petit, on arrive à faire adhérer le club et les joueurs à nos idées », sourit M. Ahufinger del Pino.

« Quand on est arrivés, la plupart des joueurs étaient empâtés », raconte Lola Sanchez. « Ils mangeaient n’importe quoi, comme des sucreries pendant les pauses. »

Un nutritionniste espagnol leur élabore désormais de nouveaux menus. Le porc et les plats en sauce ont été supprimés et remplacés par poulet, poisson, crevettes et légumes cuits à l’eau.

« C’est plus sain et scientifique », reconnaît He Zichao, 25 ans, défenseur et étudiant en marketing, qui dit apprécier la nouvelle ambiance ibérique.

– ‘Plus coulants’ –

« Avant, le club inspectait nos chambres, imposait plein de règles. Les Espagnols sont plus coulants. Mais en retour, ils attendent que tu sois à 100% le jour du match », dit-il.

Des patrons chinois ont investi massivement dans le football européen ces dernières années: en France (Auxerre, Sochaux, Lyon), en Italie (AC Milan, Inter Milan), en Espagne (Espanyol Barcelone, Atletico Madrid, Grenade) ou encore en Angleterre (Manchester City, Aston Villa).

Les clubs professionnels, eux, ont déboursé des sommes folles pour attirer des stars (Carlos Tevez, Oscar, Hulk…) souvent payées au-dessus de leur valeur sur le marché.

« En Chine, les entreprises et les clubs ont beaucoup d’argent. Mais ils ont des lacunes en gestion et en technique », estime He Zichao, le joueur.

« Si le club était resté à 100% chinois, on n’aurait pas pu améliorer le niveau de l’équipe », renchérit Luo Bin, vice-directeur général du club. « On a vendu pour pouvoir bénéficier des concepts les plus avancés du football mondial. »

L’objectif des investisseurs venus de « Xibanya » (« Espagne » en chinois) est de faire monter l’équipe en deuxième, puis en première division (Super League). « Si on y arrive, la valeur du club va beaucoup augmenter. Et donc mécaniquement la valeur de notre participation », explique Lola Sanchez.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire