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Pour l’ultra champion Kilian Jornet, vivre c’est prendre des risques

« Vivre c’est prendre des risques »: raide dingue de la montagne qu’il gravit à la vitesse de l’éclair juste chaussé de baskets, le phénomène Kilian Jornet joue avec le feu. Mais c’est pour mieux se sentir vivant.

« Etre vivant, qu’est-ce que ça veut dire ? Ce n’est pas être dans un fauteuil avec du coton autour parce que ça, ça peut tuer la vie. Vivre, c’est sortir dehors, prendre des risques. Mais c’est comme en amour, il faut savoir prendre des risques », confie Kilian Jornet à l’AFP.

L’Espagnol âgé de 29 ans participe depuis mercredi à Arêches-Beaufort (Savoie) à sa 7e Pierra Menta, la course emblématique du ski alpinisme qu’il a remportée à quatre reprises. Un total de 10.000 mètres de dénivelées positives sur quatre jours.

« La montagne, c’est ma folie, ma passion. C’est depuis toujours. Mes parents m’ont appris l’amour pour la montagne, je n’ai pas eu le choix ! », dit en français ce Catalan, qui part à l’assaut des sommets en t-shirt, short et baskets.

Physique filiforme (1,71 m, 58 kg), Jornet est considéré comme le meilleur spécialiste de tous les temps. Son truc ? Des verticales (1000 m de montée le plus rapidement possible) et des longues distances d’ultra-trail (160 à 200 km dans des parcours en montagne, en montant et en descendant).

‘Des choses exceptionnelles’

« Je fais des choses qui peuvent sembler exceptionnelles mais je m’entraîne énormément, je suis né en montagne, j’ai toujours fait ça. Chacun dans son métier veut bien faire les choses et essayer d’explorer. Moi j’ai fait ça dans le sport », dit humblement ce passionné de littérature.

Et pourtant ! Triple vainqueur de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc (UTMB) et septuple champion du monde de ski-alpinisme, il enchaîne les exploits. En juillet 2013, il n’a eu besoin que de 4 h 57 min pour faire l’aller-retour entre l’église de Chamonix et le sommet du Mont-Blanc (4810 m).

Une performance qui s’inscrit dans le cadre de sa dernière folie: monter et redescendre en sprint huit grands sommets du monde, en autonomie complète et plus légèrement vêtu. Un projet baptisé ‘The summits of my life’, et non sans risque.

« En montagne, on est souvent exposé aux risques, aux accidents », dit-il. J’ai eu des amis chers qui ont perdu la vie à côté de moi. On continue tous parce que c’est le moteur de notre vie. On accepte ce risque, on ne le comprend pas mais on l’accepte ».

Vivre avec la peur

En juin 2012, Kilian Jornet a vu mourir l’un de ses meilleurs amis, Stéphane Brosse, qui a chuté de 600 m après la rupture d’une corniche de neige alors qu’ils tentaient tous les deux la traversée du massif du Mont-Blanc d’est en ouest.

« C’est sûr qu’il y a des moments très durs mais c’est la vie même », glisse-t-il. « Oui, je vis avec la peur mais il faut savoir l’écouter. La peur est là pour nous dire quelque chose. Si on n’avait pas peur de sauter de 1000 m, on sauterait et on se tuerait. Il faut être honnête avec soi-même, avec ce qu’on peut faire ou pas. Cette peur-là est celle qui nous maintient en vie ».

Le 7 septembre 2013, Jornet a eu peur. Pas pour lui mais pour sa compagne, la Suédoise Emelie Forsberg, avec qu’il grimpait sur la face nord de l’aiguille du Midi. A quelque 50 m du sommet (situé à 3842 m), Jornet a senti que « continuer pouvait mettre en danger (s)on accompagnant ». Il a alors appelé les gendarmes de Chamonix qui ont secouru le couple.

Emelie Forsberg, qui vit en Norvège avec Jornet depuis un an, persiste tout de même dans ce nouveau terrain de jeu pour elle. Elle participe elle aussi à la Pierra Menta. « En amour, il faut savoir prendre des risques ».

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